de 2002 à 2006/ impressions numériques, encre, papier
Galerie ERBAN, Le ring Artothèque - Nantes, Centre d'art Bouvet Ladubay - Saumur.
Réalisée à partir de nuanciers numériques (pantone, toyo…) cette collection de dessins se construit et se déploie par enchaînement, un dessin en entraînant un autre. Jouant des caractéristiques et d'un vocabulaire formel relatifs à l'emploi de l'outil numérique (croisé, superposé, allongé, étiré, échelle…). Chacun de ces nuanciers est alors pertubé par une succession de formes. Motifs géométriques résolument abstraits, brouillant ainsi le dessin, le modifiant, allant parfois jusqu'à une disparition totale du module de base. Ce parasitage de surface entraîne des troubles de lecture, des doutes sur la définition de la couleur et de son lieu.
Comment peindre ou dessiner aujourd’hui ? Éric Gouret répond : par combinaisons et par ricochets ! Son outil : un logiciel de dessin, très basique, doté d’un nuancier de couleurs, non moins primaire. Toutefois, parmi l’infinité de dessins possibles, seulement certains seront retenus. La production ne réside plus dans un acte démiurgique de création – la terrifiante page blanche – mais résulte d’une décision d’assemblage de lignes et de formes déjà là. S’il apparaît élémentaire, ce choix n’en est pas moins essentiel. Les arbitrages font appel à des décisions somme toute assez classiques : composition, espace, couleur. Le vocabulaire de base est volontairement limité : carrés, cercles, grilles. La syntaxe l’est tout autant : superposition, juxtaposition, duplication, dispersion, concentration. Ces dessins numériques déjouent, sans les mépriser, les codes de la peinture moderne abstraite et géométrique (le grand-oncle, Mondrian), instillant ironie et distance (le grand frère, François Morellet). Nombre d’entre eux s’émanciperont de la feuille pour investir l’espace, au gré des sollicitations. Ainsi, on a pu découvrir, en 2006, à la chapelle des Calvairiennes, à Mayenne, un jubilatoire dessin-plafond constitué de rubans-adhésifs.
Le dessin acquis en 2006 par la société SABA Conseil, membre du Ring Club (1), met en jeu des grilles qui se superposent. Effets de plan et volume, frontalité et profondeur, opacité et transparence, oscillation et vibration : le regard se trouble. Peinture moderne, post-moderne ou néo-moderne ? L'œuvre résiste à toute tentative de classification. Peinture contemporaine, assurément, qui regarde tout autant du côté d’une certaine tradition de la peinture (la famille est nombreuse) que du côté des réseaux et des flux que l’on retrouve aussi bien dans l’espace urbain que dans les systèmes de production et de circulation de l’information. Espace réel / espace virtuel : une installation pérenne accompagne les déambulations des usagers du lycée Aristide-Briand de Saint-Nazaire.
Olivier Delavallade
(1)Le Ring Club est un groupe de collectionneurs qui complètent les acquisitions de la ville de Nantes.